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Vient de paraitre – « Klee, Macke, Moilliet » ou la genèse d’un voyage mythique

Le Goethe-Institut en Tunisie vient de faire paraitre un ouvrage consacré au « Tunisreise », le voyage en Tunisie de trois artistes européens en 1914. Ce livre consacré à Paul Klee, August Macke et Louis Moilliet est en fait le catalogue accompagnant l’exposition des oeuvres de ces trois peintres qui se poursuit actuellement au musée du Bardo.
L’ouvrage, sobrement intitulé « Klee, Macke, Moilliet », est publié en Tunisie par les éditions Cérès. Tout comme l’exposition, ce livre a bénéficié du soutien de nombreuses institutions en Tunisie, en Suisse et en Allemagne.
C’est le ministère des Affaires étrangères de la République fédérale d’Allemagne qui est le principal financeur de ce projet, le Goethe-Institut étant mandaté par ses soins. En Suisse, c’est la fondation Pro Helvetia et l’ambassade de Suisse en Tunisie qui ont été les principaux sponsors. Enfin, le ministère de la Culture tunisien est bien évidemment le premier appui à cet événement qui bénéficie également de l’apport de la fondation Lazaar et de plusieurs entreprises tunisiennes.
L’éloge de la lumière tunisienne
Paul-Klee-Red-and-Yellow-Houses-in-TunisCet album de 112 pages est essentiellement dédié à la reproduction des oeuvres exposées au Bardo. Ainsi, 33 dessins et peintures  sont présents dans cet ouvrage qui, d’ailleurs, une fois n’est pas coutume, fait la part belle à Louis Moilliet. En effet, 21 oeuvres de Moilliet sont présentées dans l’ouvrage dont certaines ont été réalisées au Maroc.
Ce n’est que justice car, au fond, c’est ce peintre suisse qui était à l’origine du voyage de 1914. De plus, ce sera le plus fidéle à la Tunisie car il y reviendra à plusieurs reprises. Trés structurées, les oeuvres de Moilliet valent autant par leur dimension chromatique novatrice  que par le surprenant hommage aux impressionnistes qu’elles recélent. Allant au bout de l’éloge de la lumière tunisienne, Moilliet instaure un monde clair aux couleurs chaudes  qui demeure similaire des approches que déploiera Paul Klee.
Ce dernier est present à travers cinq oeuvres seulement, pour l’essentiel des dessins et esquisses qui ne disent pas grand chose de l’impact profond du voyage de Tunisie sur ce peintre. Toutefois, Klee est le fil rouge de cet ouvrage grâce à la publication in extenso des pages de son Journal relatives au « Tunisreise ». Ainsi, 25 pages de cet album nous mettent dans les pas et le regard de Klee qui, à sa manière, raconte le périple et les tribulations des trois artistes.
August Macke maintenant qu’un destin funeste emporta quelques mois après son voyage tunisien. On retrouve sa trace à travers sept oeuvres dont cinq furent réalisées en 1914 en Tunisie, des dessins et esquisses encore une fois. Là aussi, la mise est sauvée par deux autres éléments.
D’une part, la couverture de l’ouvrage est signée Macke et représente un marchand de bijoux en 1914. D’autre par, une section du livre reprend quatre photographies prises par Macke lors du voyage des trois compagnons.
Tels sont les contours de l’ouvrage qui est complété par deux textes, une introduction et la préface de Christiane Bohrer, directrice du Goethe-Institut de Tunis.
Une trace de l’exposition du Bardo
expo-klee-make-moillet-bardoEdité par Anna M. Schafroth, cet ouvrage est naturellement introduit par celle qui est la conceptrice de l’exposition. Dans son introduction, elle revient sur les conditions du jubilé de 2014, revient sur les grands axes du « Tunisreise » et justifie le choix des oeuvres exposées.
Schafroth signe également un texte intitulé « Paul Klee, August Macke et Louis Moilliet en Tunisie ». Elle y souligne l’importance du voyage au Maghreb pour les artistes, revient sur la genèse de ce voyage puis analyse certaines des oeuvres exposées.
Un second texte, intitulé « La Régence de Tunis à l’aube du XXème siècle » compléte l’ouvrage. En sept pages, Saloua Khaddar Zangar y revient sur le contexte socio-politique de la Tunisie de l’époque et mentionne rapidement écrivains et peintres de renom ayant visité la Tunisie à cette époque. Ce texte s’achéve sur les tiraillements de la société tunisienne pendant les années trente.
Dans sa préface qui ouvre l’ouvrage, Christiane Bohrer revient sur les conditions de la naissance de ce projet. Elle évoque aussi bien la disparition subite de Hamadi Cherif qui avait rêvé de ce projet que le soutien allemand à la transition tunisienne. Elle souligne aussi l’implication grandissante des ambassades allemande et suisse en Tunisie ainsi que le soutien des autorités tunisiennes avec à leur tête le ministre de la Culture, Mourad Sakli, et le directeur du musée du Bardo Moncef Ben Moussa.
Bohrer profite de cette préface pour remercier les nombreux sponsors dans les trois pays concernés et saluer le travail soutenu du curateur de l’exposition Anna Schafroth.
Au delà, la directrice de l’institut Goethe note que jamais une exposition d’originaux du voyage de 1914 n’avait été réalisée en Tunisie. Ce qui est désormais chose faite…
Une chronologie, une bibliographie et une mention du catalogue des oeuvres complétent ce livre-catalogue qui vient juste de paraitre, instaurant une trace de l’exposition qui se poursuit au Bardo et constitue l’un des événements majeurs de la saison culturelle.
Hatem BOURIAL

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Arts plastiques – Les liasses éberluées de Leïla Shili

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Pour sa première exposition personnelle, Leila Shili est doublement adoubée. Par Mongi Maatoug d’abord, ancien doyen des artistes plasticiens, enseignant aux Beaux-Arts et peintre devant l’Eternel. Par Kaouther Jellazi Ben Ayed, critique dont les travaux investissent le domaine des arts, avec une attention particulière aux techniques picturales.
Avec ces deux soutiens de taille, Leila Shili pouvait aussi compter sur trois autres atouts. En premier lieu, le flair rarement démenti de Lotfi El Haffi et Amina Hamrouni, animateurs de la galerie Mille Feuilles qui abrite l’exposition. Ensuite, c’est le thème de l’exposition, son fil conducteur qui consiste en un concept clair, nouveau et surtout singulier.
Enfin, Shili pouvait compter sur l’expérience engrangée au fil des années antérieures durant lesquelles elle a multiplié les participations au sein de nombreuses expositions de groupe.
Un parcours de dix ans
Car Shili ne sort pas de nulle part mais surgit, soliste chromatique, après une maturation d’une dizaine d’années au cours desquelles elle a participé à neuf expositions de groupe en Tunisie et quatre autres à l’étranger.
Ne nous trompons pas: il ne s’agit pas de participations symboliques car l’artiste figure parmi les acquisitions de notre ministère de la Culture mais aussi d’institutions publiques et privées en Chine, en France ou au Canada. Ce qui permet de mesurer le chemin parcouru par cette ressortissante de l’Ecole des Beaux-Arts de Tunis qui, tout en ayant remporté son master en 2007, poursuit actuellement une thèse en doctorale.
Ce parcours relatif mais balisé par de nombeuses récompenses souligne la permanence de la quête de Leila Shili et ses ambitions dans le domaine pictural. En effet, cette jeune artiste est, entre autres prix, récipiendaire du Challenge ATB et du prix CTAM’ART. A ce titre, la première exposition de Leila Shili a bénéficié du soutien de l’ATB, sponsor de l’événement et éditeur d’un catalogue de 26 pages qui compile une quinzaine d’oeuvres ainsi que les deux textes critiques de Mongi Maatoug et Kaouther Jellazi Ben Ayed.
Natures mortes et Monopoly virtuel
Le titre de l’exposition est tout un programme puisqu’il fait rimer les pigments du peintre avec le pognon du banquier. Probable clin d’oeil à son sponsor, Shili a choisi la thématique de l’argent pour les oeuvres qu’elle expose. L’ensemble de la collection est constitué de tableaux d’un format appréciable (100 sur 130cm).
Et de l’argent, il en sera question dans chaque oeuvre, assortie d’un titre qui renvoie au patrimoine populaire tunisien, aux mille dictons et proverbes ayant trait aux sous qu’on amasse un par par un ou encore au grisbi qui n’a pas d’odeur.
Toutes les déclinaisons sonnantes et trébuchantes défilent en peinture. Du fric, de l’oseille et de la grosse galette! Du péze, du pognon et des radis bien ronds! De l’artiche, de l’avoine, du flouze! En un mot, c’est un hymne au fric, du petit denier qui traine au fond d’une poche aux pécules aux allures de trésor.
cb1287_b3c90a0f1841f380fda2735d21eb54f8.jpg_1024Shili joue. Cette exposition est un jeu, une sorte de Monopoly virtuel, un espace ludique au sein duquel billets de banque et piéces de monnaie se transforment en protagonistes de l’artiste créateur.
Des sacs, des pelles et des fontaines métaphoriques peuplent les toiles de Shili dont la technique et la gestion de l’espace pictural sont assimilables à celles d’un Abderrazak Sahli ou d’un Combas.
Un espace eclaté, des motifs en déséquilibre et une occupation de la toile par des fragments qui s’interpellent sont la méthode choisie par Shili pour cette collection qui, parfois, prend des allures de cadavres exquis surréalistes. Ainsi, certaines toiles font cohabiter billets voletant avec des gouttières qui déversent de l’argent.
Mieux encore, Shili détourne la technique des natures mortes pour figurer vases et récipients garnis d’argent en lieu et place des traditionnels fruits et agrumes. Surprenantes compositions florales qui cherchent la beauté plastique dans une liasse de billets ou la surface plane d’un vide-poche. Rien que cette série de natures inanimées voire trébuchantes mérite le détour pour son caractére iconoclaste par rapport à la tradition de la nature morte et ses ricochets intellectuels qui, au fond, sonnent comme une supplique brocardant inflation galopante et argent raréfié.
Dans cette optique, Leila Shili parvient à dire notre époque, l’omniprésence du matériel, les marchands du temple et la valeur débridée d’un pognon qui remplace tout. En transfigurant des natures mortes, en semant des billets partout, elle ne fait que rendre compte, forte de son regard d’artiste, de nos obsessions, de cette propension à voir de l’argent partout.
La réminiscence des « xenia » antiques
C’est ainsi que Leila Shili tente de bouleverser notre regard, nous mettre face à des toiles qui s’apparentent à des espaces hallucinatoires ou l’argent volerait à tout vent. En vérité, il s’agit, dans une dimension métaphorique, d’un beau pied-de-nez à une époque qui ne pense qu’argent, ne rêve que capital, ne vibre que pognon, s’enlisant ainsi dans une aliénation dont Shili traque la présence dans ses toiles.
Dans cette collection détonante, il est d’autres oeuvres singulières. Il s’agit d’une série de poules pondeuses entourées de probables oeufs d’or. Sur quatre niveaux et selon une géométrie raisonnée, Shili peint des poules multicolores qui, bien évidemment, renvoient à l’imagerie de la poule aux oeufs d’or. Toutefois, ce faisant et de manière probablement inconsciente, elle recrée dans sa toile la démarche du « pictor imaginarius » de l’Antiquité, ce maître-mosaiste qui dessinait le monde à l’aide de ses tesselles. Comment procéde Shili? En fait, ces toiles en particulier respondent à la distribution spatiale des « xenia », mosaiques de bienvenue et offrandes rituelles. On peut voir ce type de mosaiques un peu partout dans nos musées. Et il est aussi surprenant que remarquable qu’un artiste contemporain reprenne à son compte cette tradition tout en la chambardant.
C’est dire les nombreux registres de références d’une Leila Shili qui convainc et instaure un univers bien à elle. Des couleurs dans toutes les tonalités, des formes vacillantes ou affirmées et, selon les séries, des équilibres géométriques ou le recours à l’onirisme. Une exposition comme on les aime car elle titille l’esprit et ouvre des espaces intellectuels sous-jacents à chaque regard.
A voir absolument!
Hatem BOURIAL

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« Ancora Imparo »

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Ancora Imparo signifie « Je continue d’apprendre », et cette phrase trouve tout son sens lorsque l’on sait que Michel Ange l’a prononcée à l’âge de 87 ans.

Cette devise est la mienne depuis la fin de mon éducation. Un apprenant est un Sisyphe éternel…

Hatem BOURIAL

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Nos amis sont nos mécènes

Fouq Essour ne bénéficie d’aucune subvention, ni publique, ni privée. Notre seul soutien sont nos amis virtuels et réels. Nos réalisations sont le fruit de nos efforts, et du soutien d’un cercle qui grandit chaque jour depuis 1982.

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Qui sommes-nous ?

Fouq Essour est un atelier d’art et de création littéraire fondé en 1982 par Hatem Bourial au souk des chéchias de la médina de Tunis.

Au fil des ans, Fouq Essour a animé un cercle de traducteurs littéraires, un nombre important de séminaires et forum intellectuels, ainsi que plusieurs autres initiatives.

Situé au coeur de la médina de Tunis, Fouq Essour est un espace culturel convivial et pluriel réunissant écrivains, artistes et intellectuels de Tunisie et d’ailleurs autour de questions historiques et contemporaines.

Fouq Essour est un espace privé, une initiative citoyenne dans le domaine culturel, qui ne bénéficie d’aucune subvention, de quelque nature que ce soit.

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